Les troisièmes rencontres sur l'informatique et le droit à Marseille:
25 mars 2007
Intervention NH BAYER Version Internet du 25 mars 2007 Commet s'explique le succès des ccTLD .de en Allemagne (1) et comment sont gérés les litiges des noms de domaines allemands .de en dehors de l'OMPI.? Présentation de l'intervention, (plan et détails, version internet) par Maître Nils Holger Bayer, Avocat franco - allemand
NHBAYER RECHTSANWÄLTE - CABINET D'AVOCATS
Intervention Nils Holger Bayer
Rechtsanwalt à Berlin
Avocat à la Cour de Paris
www.nhbayer.de
TITRE 1: LE PLAN:
Première Partie : Le succès du ccTLD .DE
Plusieurs facteurs qui ont certainement contribué au succès des domaines.de .
A. L’Allemagne a développé une forte culture web
B. Les Allemands sont attachés à leur extention nationale (ccTLD .de).
C. Les ccTLD .de sont peu chers ; ils sont moins chers que les .com et autres.
D. L’accès aux ccTLD a toujours été plus simple en Allemagne ; il n’a pas été restreint aux institutions publiques et aux entreprises. De plus, en Allemagne, il a été possible de réserver des noms de domaine sans les connecter. La population allemande est bien plus importante que celle de la France.
E. L’enregistrement est très facile.
Il n’y a aucun contrôle de légalité du nom de domaine au moment du premier enregistrement.
Il n’y a pas de liste de noms de domaine interdits.
Il est même admis de faire enregistrer des noms génériques.
Ainsi, le nom de domaine www.rechtsanwalt.de est conforme à la loi et à la déontologie en Allemagne (contrairement à www.avocat.fr.)
Deuxième Partie : Les litiges relatifs aux noms de domaine .de
A. Les institutions compétentes pour résoudre ces litiges
1. Les institutions d’arbitrage
2. Les facultés limitées d’intervention de la DENIC
a. Principe : absence de contrôle de légalité
b. Limites :
- obligation d’intervention dans les cas flagrants de violation de droits sur demande de la personne aux droits de laquelle il a été porté atteinte
- obligation d’enregistrement des mentions « dispute »
3. La compétence internationale des tribunaux allemands et le droit applicable
a. La compétence internationale
Conformément à l’article 5 n° 3 du Règlement 44/2001 du Conseil européen en date du 22 décembre 2000, à l’article 32 du Code de procédure civile allemand (ZPO) et à l’article 14 alinéa 2 première phrase de la loi (allemande) contre la concurrence déloyale (UWG), les tribunaux allemands sont compétents dans tous les cas où un délit a été commis en Allemagne en contravention de ses lois.
b. L’application du droit allemand
Dans le domaine du droit délictuel, l’application du droit allemand suit le principe de « lex fori ».
En droit des marques: territoire dans lequel le demandeur cherche à être protégé.
Concernant la protection des noms et le droit délictuel général
La simple faculté de téléchargement suffit.
En droit de la concurrence
Le lieu déterminant est celui où les intérêts des parties sont en opposition.
B. Les solutions développées par la jurisprudence
1. Protection des marques, signes distinctifs et enseignes
Les articles 14 et 15 de la loi sur les marques confèrent le droit à demander :
- la cessation de l’utilisation de la marque ou du signe et
- des dommages-intérêts.
L’utilisation d’un nom de domaine d’un tiers constitue une usurpation de nom ou une utilisation illégale d’un signe (BGH shell.de) qu’il convient de sanctionner.
Toutefois, une application des sanctions prévues en droit des marques (ainsi qu’en droit de la concurrence) nécessite une utilisation du nom de domaine à des fins com-merciales.
Pb1 : Si le site n’a pas encore de contenu
Pb2 : Une personne privée bloque le nom de domaine d’une entreprise reputée.
Pb3 : Le cas de deux noms identiques ou de deux noms similaires (Article 23 Markengesetz):
2. Protection du nom selon l’article 12 BGB (à titre subsidiaire par rapport au droit des marques/signes distinctifs).
En droit des noms, l’art. 12 BGB (Code civil allemand) permet seulement d’intenter une action contre une personne qui utilise le même nom mais qui n’a aucun droit propre sur le nom en cause (OLG Köln CR 2002, 533, 534 – guenter-jauch.de), (cf. kurt-biedenkopf.de) ; collectivités territoriales: celui qui télécharge le nom de domaine « heidelberg.de » attend une information de la ville de Heidelberg et non pas seulement sur la ville de Heidelberg mais fournie par un tiers.
« oil-of-elf.de » : CA Berlin Jr PC web-doc130/2002, Abs. 1-36). Liberté d’expression et la liberté de presse de l’association Greenpeace prévalent sur l’intérêt du groupe Elf à faire interdire l’utilisation de ce nom de domaine.
3. Protection contre la conccurence déloyale (domaingrabbing)
L’article 4 n° 10 UWG ; (BGH CR 2005, 511, 512 – literaturhaus.de).
Domaine « krupp »
Les noms génériques sont légaux : (rechtsanwaelte.de)
TITRE 2: Les détails
Première Partie: Le succès du ccTLD .DE
Il n’est pas facile de trouver une réponse à cette question, d’autant plus que je n’ai trouvé aucune publication détaillée sur ce thème. Cependant, il y a plusieurs facteurs qui ont certainement contribué au succès de domains.de .
Selon des données chiffrées de la DENIC (l’AFNIC allemande) datant de janvier 2007, il y a plus de 10,5 millions de noms de domaines .de depuis sa création (en 1994).
Les facteurs qui ont contribué à ce succès sont les suivants :
1/ L’Allemagne a développé une forte culture web :
- Le Minitel allemand, appelé BTX, n’a jamais connu un succès comparable à celui qu’a connu le Minitel en France, et n’a eu absolument aucun succès chez les particuliers
- Par conséquent, il y avait déjà en France un moyen très commun d’utilisation d’une technique moderne d’information, ce qui a peut-être ralenti le développement de l’utilisation de l’internet
- Les chiffres le montrent bien :
En effet, d’après les derniers chiffres, 40 millions de personnes, soit environ 50% des Allemands, utilisent l’internet au moins une fois par mois. En France, ils ne sont que 30 millions. Il y a 33 millions d’internautes actifs à domicile en Allemagne, contre 17 % en France, soit environ la moitié.
Les chiffres du commerce électronique confirment ce développement :
En Europe, 30% du marché électronique est détenu par l’Allemagne, suivi de l’Angleterre (avec 18 %) et de la France avec seulement 14 % (indicateur recherche ebay).
2/ Les Allemands sont attachés à leur extention nationale (ccTLD .de). Dans le commerce, le .de est le plus utilisé, suivi du .com (d’importance comparable au .de), les autres TLD n’étant le plus souvent choisis que dans l’hypothèse d’un blocage ou de celle où le nom est déjà utilisé par une autre personne.
Les ccTLD .de sont peu chers ; ils sont moins chers que les .com et autres.
A l’heure actuelle, l’enregistrement au DENIC coûte 58 € et une année de hosting (hébergement de site) coûte le même prix.
Les service providers (bureaux d’enregistrement) agrées par le DENIC ont leurs propres prix : ils ne demandent souvent que 5 euros pour l’enregistrement et qu’un montant compris entre 60 centimes et 12 euros par mois pour le webmail hosting. Les prix ont baissé à plusieurs reprises. Chaque internaute a donc les moyens financiers d’acquérir des noms de domaine.
3/ L’accès aux ccTLD a toujours été plus simple en Allemagne ; il n’a pas été restreint aux institutions publiques et aux entreprises, comme cela a été le cas en France.
De plus, en Allemagne, il a toujours été possible de réserver des noms de domaine sans les connecter. Cela pourrait avoir poussé des particuliers à enregistrer plus de noms, y compris des noms autres que les leurs.
4/ La population allemande est bien plus importante que celle de la France.
5/ L’enregistrement est très facile. Les conditions sont les suivantes : il suffit d’être domicilié en Allemagne ou de choisir une sorte de domicile d’élection chez un tiers (service provider : pestataire de service internet/ bureau d’enregistrement), ce qui est facilement organisé par internet.
En France, les entreprises doivent présenter un siret, ce qui n’est pas nécessaire en Allemagne, et les particuliers habitant à l’étranger n’ont aucune possibilité leur permettant de créer un domaine .fr en France.
Il n’y a aucun contrôle de légalité du nom de domaine au moment du premier enregistrement. Il existe seulement un contrôle automatisé qui vérifie si le domaine est déjà enregistré.
Il est alors facile de faire enregistrer des domaines interdits. Le contôle se fait a posteriori soit si quelqu’un prétend avoir de meilleurs droits sur le nom du domaine, soit s’il prétend être victime d’une concurrence déloyale, soit encore pour d’autre raisons (voir décisions Biedenkopf www.kurt-biedenkopf.de et www.ambiente.de.: BGH 19 février 2004 et 17 mai 2001).
Il est alors simple de faire enregistrer des noms différents de celui du requérant.
Il n’y a pas de liste de noms de domaine interdits.
Il est même admis de faire enregistrer des noms génériques.
Ainsi, le nom de domaine www.rechtsanwalt.de est conforme à la loi et à la déontologie en Allemagne (contrairement à www.avocat.fr.)
Deuxìème Partie: Les litiges relatifs aux noms de domaine .de
A. Qui est compétent pour régler les litiges relatifs aux noms de domaine .de ?
B. Quelles sont les principales solutions constatées ?
C. Les institutions compétentes pour résoudre ces litiges
4. Les institutions d’arbitrage
- Les institutions allemandes : En matière de noms de domaine, il n’y a en Allemagne ni centre d’arbitrage accrédité spécialisé, ni institution arbitrale spécialisée.
Les parties concernées n’ont le plus souvent rien convenu sur l’institution compétente car elles ne se connaissent même pas.
- Les institutions internationales :
L’OMPI (WIPO) vous est bien connue. Elle n’a pas d’équivalent allemand. Il n’y a aucun Centre d’arbitrage accrédité (ou « Dispute Resolution Provider ») agréé par l’ICANN pour régler les litiges selon les dispositions de la UDRP et de la RUDRP. La DENIC n’a aucune fonction arbitrale comparable à celle qu’a l’OMPI.
Les litiges relatifs aux TLDs figurant sur la liste de l’OMPI, qu’ils soient localisés en Allemagne ou en France, sont soumis aux mêmes règles et institutions. Ainsi, tout litige concernant un des TLD retenus peut, depuis le 1er décembre 1999, être entendu par cette institution dans l’hypothèse où les parties concernées l’ont choisi. Cependant, les ccTLD.de ne font pas partie des TLDs qui figurent sur la liste de l’OMPI.
Dans ce contexte, la plupart des cas ont été soumis à l’appréciation des tribunaux allemands, lesquels se sont également déclarés compétents pour connaître, outre des litiges relatifs à des ccTLD allemands, de ceux portant sur les domaines .com et autres TLDs.
5. Les facultés limitées d’intervention de la DENIC
c. Principe : absence de contrôle de légalité
La DENIC n’exerce aucun contrôle de la légalité des noms de domaine au moment du premier enregistrement (cf. jugement du Bundesgerichtshof -C.Cass. chambre civile allemande- dans les dossiers ambiente.de et kurt-biedenkopf.de, déjà évoqués).
Il s’ensuit que la DENIC ne peut pas être pousuivie pour complicité dans des manoeuvres déloyales visant à usurper un nom ou en violation de droits de marque.
Sa fonction se borne en principe à l’enregistrement – une fonction urement technique. Bien qu’elle participe involontairement à la réalisation d’un délit en fournissant les moyens techniques de la commission du délit, sa responsabilité est en principe complètement exclue.
d. Limites :
- obligation d’intervention dans les cas flagrants de violation de droits sur demande de la personne aux droits de laquelle il a été porté atteinte
Toutefois, cette obligation nécessite que la personne aux droits de laquelle il a été porté atteinte (dont le nom de domaine a, par exemple, été bloqué : cf. shell.de) ait préalablement revendiqué ses droits. Il s’agit alors d’une intervention a posteriori. Dans cette hypothèse, la DENIC est non seulement compétente, mais elle a également l’obligation d’intervenir (par ex. en débloquant le nom de domaine concerné).
- obligation d’enregistrement des mentions « dispute »
Par le biais de cet enregistrement, il est possible d’empêcher l’acquisition du nom de domaine par un tiers au moment où ce nom de domaine est débloqué par la DENIC suite à une décision de justice ou, dans les cas flagrants, suite à la décision de la DENIC elle-même.
Limites: L’enregistrement de la mention « dispute » poursuit uniquement le but sus-mentionné.
Cet enregistrement ne permet donc pas la transmission du nom de domaine désiré au demandeur.
Celui-ci doit attendre une décision de justice ou, dans les cas flagrants, l’intervention directe de la DENIC afin de débloquer le nom de domaine puis enregistrer ce nom à son profit. L’enregistrement de la mention « dispute » lui permet d’empêcher que des tiers enregistrent le nom du domaine au moment du déblocage.
La DENIC n’est pas tenue d’empêcher l’enregistrement de noms de domaine de personnes renommées qui ne demandent pas elles-mêmes un tel enregistrement (BGH Biedenkopf). Il est toujours possible que d’autres personnes portant le même nom veuillent demander un premier enregistrement de ce nom à l’avenir, ce qui paraît absolument légal et exclut toute sorte d’illégalité flagrante.
Il résulte de tout cela qu’il a fallu que les tribunaux allemands interviennent. Ils ont été appelés à résoudre des litiges touchant aux noms de domaine surtout entre 1995 et 1998. Depuis, il n’y a pas eu beaucoup de changements de jurisprudence et, suite à plusieurs décisions du Bundesgerichtshof, la jurisprudence, auparavant souvent contradictoire, a été largement unifiée.
6. La compétence internationale des tribunaux allemands et le droit applicable
c. La compétence internationale
Conformément à l’article 5 n° 3 du Règlement 44/2001 du Conseil européen en date du 22 décembre 2000, à l’article 32 du Code de procédure civile allemand (ZPO) et à l’article 14 alinéa 2 première phrase de la loi (allemande) contre la concurrence déloyale (UWG), les tribunaux allemands sont compétents dans tous les cas où un délit a été commis en Allemagne en contravention de ses lois. En ce qui concerne la notion de commission de ces délits, un uploading est suffisant. Il est également suffisant que le domaine puisse être téléchargé avec une intention spécifique, s’il existe un lien économique suffisant entre le contenu du site et l’Allemagne ou le marché concerné en Allemagne (bestimmungsgemäße Abrufbarkeit). Le site doit être destiné au téléchargement en Allemagne. Le fait qu’un téléchargement soit simplement possible ne suffit pas. Le lieu d’enregistrement du domaine n’est pas déterminant. Ainsi les tribunaux sont-ils également compétents pour traiter de litiges concernant des domaines .fr si les conditions sus-mentionnées sont réunies (concernant un TLD .com enregistré à l’étranger : KG CR 1997, 695, 696 concert-concept.com).
d. L’application du droit allemand
Dans le domaine du droit délictuel, l’application du droit allemand suit le principe de « lex fori », principe qui signifie que les règles du droit international privé désignent le droit national des tribunaux compétents en tant que droit applicable. Ainsi, c’est le droit national qui détermine de quelle nature de litige il s’agit.
En droit des marques, on applique le droit du territoire dans lequel le demandeur cherche a être protégé. Le Bundesgerichtshof essaie de restreindre le domaine d’application du droit allemand des marques en exigeant un critère supplémentaire : l’existence d’un lien entre le contenu du site mis à la disposition des internautes et le marché allemand. Ce lien est censé exister au moment où le propriétaire du site et du nom de domaine envisage le téléchargement du site par les internautes en Allemagne. La simple faculté de téléchargement ne suffit pas.
Les indices caractérisant ce lien sont les suivants : utilisation de la langue allemande, volonté exprimée de distribuer en Allemagne, indication d’un numéro de téléphone allemand ou d’une adresse allemande.
Concernant la protection des noms et le droit délictuel général
La simple faculté de téléchargement suffit.
En droit de la concurrence
Le lieu déterminant est celui où les intérêts des parties sont en opposition.
Dans l’hypothèse où il est fait obstacle à la promotion d’un produit sous un nom de domaine destiné à être téléchargé par des consommateurs allemands, le droit de la concurrence allemand s’applique. Sont en principe concernées toutes les adresses d’entreprises qui offrent (ou veulent offrir) des produits sur le marché allemand sous les noms de domaine « ccTLD .de » et « TLD .com ».
D. Les solutions développées par la jurisprudence
4. Protection des marques, signes distinctifs et enseignes
Les articles 14 et 15 de la loi (allemande) sur les marques (Markengesetz) s’appliquent si l’enregistrement ou la connexion du nom de domaine crée un danger de confusion.
Par exception, la condition du danger de confusion n’est pas exigée dans l’hypothèse où quelqu’un s’empare de la réputation d’un signe distinctif ou d’une marque à des fins personnelles.
Les articles 14 et 15 de la loi sur les marques confèrent le droit à demander :
- la cessation de l’utilisation de la marque ou du signe et
- des dommages-intérêts.
L’utilisation d’un nom de domaine d’un tiers constitue une usurpation de nom ou une utilisation illégale d’un signe (BGH shell.de) qu’il convient de sanctionner.
Toutefois, une application des sanctions prévues en droit des marques (ainsi qu’en droit de la concurrence) nécessite une utilisation du nom de domaine à des fins commerciales.
Pb1 : Si le site n’a pas encore de contenu, il faut rechercher d’autres indicateurs, qui peuvent être par exemple la publicité pour une activité à venir, des contrats avec des service-providers (prestataires de services internet/bureuax d’enregistrement)...
Pb2 : Une personne privée bloque le nom de domaine d’une entreprise reputée.
Il a été jugé que la personne privée agit, dans cette hypothèse dite du « domaingrabbing », à des fins commerciales parce que le but recherché est de faire du profit avec la vente du nom de domaine.
Pb3 : Le cas de deux noms identiques ou de deux noms similaires (Article 23 Markengesetz):
En droit commercial général, le droit de celui qui a utilisé son nom en premier trouve ses limites là où une autre personne du même nom ou du même nom commercial l’utilise.
Dans ces cas, il faut trouver une solution équitable prenant en compte tous les intérêts en présence. Le même principe vaut pour le droit de la protection des noms, conformément à l’article 12 du Code civil.
Pendant un certain temps, ce principe n’a pas été appliqué en droit des signes distinctifs. En effet, le principe « premier arrivé, premier servi » a longtemps subsisté, sauf si l’utilisation du nom de domaine était illégitime (p. ex. en cas d’utilisation d’un nom de domaine qui crée un danger de confusion apparent et en absence de motif légitime). Finalement, la jurisprudence a étendu les solutions dégagées dans l’hypothèse des noms identiques au droit des signes distinctifs. Par conséquent, il faut ici aussi trouver une solution équitable qui respecte les intérêts des parties (ex. Fielmann.de changé en fielmann-reisen.de - confirmé dans l’affaire Vossius, BGH WRP 2002, 691, 694- vossius.de).
Dans l’affaire Vossius (où il s’agissait d’un litige entre deux homonymes, tous deux avocats en droit des brevets) allemands, donc ingénieurs muni d’une formation juridique complémentaire), il a été jugé que celui qui avait les droits les plus récents sur le nom en cause mais qui était le premier à avoir enregistré ce nom comme nom de domaine (vossius.de) n’était pas tenu de l’abondonner à celui qui avait les droits plus ancients, à condition qu’il mentionne sur la première page du site qu’il ne s’agit pas du site de son confrère du même nom (BGH sus-indiqué).
Selon une décision de la CA de Munich (OLG München/CR 1998, 556), le propriétaire d’une marque est en droit de poursuivre les droits qu’il tient des articles 14 et 15, même s’il n’y a aucune identité de branches de marché, dans l’hypothèse où quelqu’un s’empare de la réputation d’une autre personne afin de dévier les clients potentiels de celle-ci sur son propre site, lequel offre d’autres prestations ou produits.
5. Protection du nom selon l’article 12 BGB (à titre subsidiaire par rapport au droit des marques/signes distinctifs).
En droit des noms, l’art. 12 BGB (Code civil allemand) permet seulement d’intenter une action contre une personne qui utilise le même nom mais n’a aucun droit propre sur le nom en cause ; la solution est donc différente de celle du droit des marques. Ainsi, celui qui a enregistré le nom de domaine en premier sera privilégié : le principe « premier arrivé, premier servi » s’applique. Ce principe vaut aussi pour les personnes célèbres, étant entendu qu’une personne célèbre s’entend d’une personne connue de tout le monde (OLG Köln CR 2002, 533, 534 – guenter-jauch.de). Les tribunaux ont jugé que le fait d’être célèbre n’autorise aucune dérogation à la solution dégagée pour les noms similaires (cf. kurt-biedenkopf.de).
Il a été décidé, concernant les collectivités territoriales, que seule la collectivité territoriale concernée avait le droit d’utiliser son nom. On a ainsi considéré que celui qui télécharge le nom de domaine « heidelberg.de » attend une information de la ville de Heidelberg et non pas seulement sur la ville de Heidelberg mais fournie par un tiers.
Toutefois, selon une décision de la CA Berlin (Kammergericht), le danger de confusion créé par l’utilisation du nom peut être exclu si, après avoir apprécié in concreto les différents intérêts en cause, l’on constate que, l’atteinte portée au nom est de moindre importance (« oil-of-elf.de » : CA Berlin Jr PC Web-Doc 130/2002, Abs. 1-36). Dans l’affaire précitée, les juges ont estimé que, bien qu’il y ait eu usurpation du nom, celle-ci était tellement insignifiante qu’aucune sanction ne devait être prononcée. En l’espèce, le site était conçu de telle manière qu’il ne pouvait y avoir de confusion avec un site (officiel) du groupe Elf. Cette solution fait prévaloir la liberté d’expression et la liberté de presse de l’association Greenpeace sur l’intérêt du groupe Elf à faire interdire l’utilisation de ce nom de domaine.
Autre exemple : un commerçant a dû abandonner son nom de domaine « krupp » au profit de la société du même nom, et cela bien que ce commerçant soit nommé Krupp. Néanmoins, dans ce cas, le commerçant avait le droit de continuer à utiliser son nom à titre de nom de domaine à condition de le compléter par une distinction descriptive de son entreprise.
6. Protection contre la conccurence déloyale (domaingrabbing)
Dans les hypothèses où les dispositions du droit des marques ou du droit des signes distinctifs sont inapplicables, l’article 4 n° 10 UWG (loi contre la conccurence déloyale) pourrait s’appliquer. D’après cette norme, doit être sanctionnée toute personne qui bloque sans motif légitime l’utilisation d’un nom de domaine dans le but de vendre ce nom de domaine (BGH CR 2005, 511, 512 – literaturhaus.de).
Contrairement au droit français, le droit allemand considère que l’utilisation de noms génériques n’est pas par elle-même constitutive de concurrence déloyale, même si le domaine est utilisé à des fins commerciales (BGH CR 2001, 777, 778 – mietwohnzentrale.de). Cette utilisation d’un nom générique n’a pas non plus été considérée comme étant de nature à créer une confusion. Personne n’attend sous le nom de domaine « rechtsanwaelte.de » une liste de tous les avocats allemands. Cette solution a pour conséquence l’application du principe « premier arrivé, premier servi ». Cependant, le site lui-même ne doit créer aucune confusion à l’égard de l’internaute.
Jurisprudence utile de la Cour fédérale :
COUR FEDERALE DE JUSTICE
JUGEMENT
AU NOM DU PEUPLE
Publiée le :
19 février 2004
Mme.......
employée de l’administration judiciaire
en qualité de greffière
dans le litige opposant
le Prof. Dr...
demandeur et demandeur au pourvoi
- Mandataires ad litem: les avocats Prof. Dr. ... et Dr. ...
contre
(1) ...
défendeur,
(2) Denic eG, représentée par les membres du directoire Andreas Bäß, Ines Balthes et Carsten Schiefner, Wiesenhüttenplatz 26, Francfort sur le Main,
défenderesse et défenderesse au pourvoi
- Mandataires ad litem : les avocats Dr. ... et Dr...
Le juge président Prof. Dr. ... et les juges Dr. ..., Dr. ..., et Dr. ... de la 1ère Chambre civile de la Cour fédérale de justice (I. Zvilsenat des Bundesgerichtshofs) ont, pendant la procédure orale du 19 février 2004,
reconnu pour droit ceci :
Le pourvoi contre la décision de la 14ème Chambre civile du Tribunal régional supérieur [Cour d’appel] de Dresde (Oberlandesgericht Dresden) du 28 novembre 2000 est rejeté aux dépens du demandeur.
De par la loi
Enoncé des faits :
Le demandeur est l’ancien Ministre-président de l’Etat libre de Saxe. La défenderesse (2) est la société DENIC. C’est elle qui attribue les noms de domaine se terminant par « de ». Le défendeur (1), qui a réservé l’adresse internet « kurt-biedenkopf.de » auprès de la défenderesse (2), a été condamné dans le présent litige, par jugement du tribunal régional de Dresde (Landgericht Dresden) rendu en partie par défaut et ayant force de chose jugée, à libérer le nom de domaine précité ainsi qu’à arrêter de l’utiliser ou de le laisser utiliser.
Par le biais de sa requête contre la défenderesse (2), le demandeur demande entre autres à ce que celle-ci cesse de laisser le défendeur (1) utiliser le nom de domaine « kurt-biedenkopf » sur internet et supprime également l’enregistrement du nom de domaine pour le compte du défendeur (1). La défenderesse (2) a reconnu ces prétentions. Le nom de domaine a été radié. Dans l’étendue de cette reconnaissance, le demandeur et la défenderesse (2) se sont entendus pour déclarer le litige comme étant réglé.
Par sa demande additionnelle, le demandeur a demandé
la condamnation, sous peine d’amende, de la défenderesse (2) en ce qu’elle doit cesser d’utiliser sur internet le nom de domaine « kurt-biedenkopf.de » ou ne pas le laisser utiliser par autrui.
Le tribunal régional (Landgericht) a rejeté la demande. Le tribunal régional supérieur (Oberlandesgericht) a rejeté l’appel du demandeur (OLG Dresden GRUR-RR 2001, 130).
Le pourvoi (recevable) du demandeur s’élève contre ce rejet ; la défenderesse (2) demande à ce que le pourvoi soit rejeté.
Motifs de la décision :
I. La juridiction d’appel a rejeté la demande en omission du demandeur ; et cela aux motifs suivants :
Par sa requête, le demandeur demande le retrait du nom de domaine « kurt-biedenkopf.de » d’internet, sans procéder lui-même à un enregistrement. Une telle prétention n’est pas invocable. L’enregistrement et l’administration du domaine ne sauraient être considérés comme une utilisation faite par la défenderesse (2). Celle-ci n’a dès lors pas violé le droit au nom du demandeur (§ 12 BGB ) ; elle n’est pas non plus coauteur ou complice d’une violation du droit au nom commise par le défendeur (1) ; ni fauteur de trouble ; il ne lui incombe aucune vérification particulière du pouvoir du déclarant de domaine. Elle n’a violé aucune obligation de vérification ; la violation du droit au nom n’était pas (sans difficulté) reconnaissable par elle, même si le demandeur est une célèbre personnalité. Des prétentions sur le fondement du droit des marques n’existent pas au motif que le demandeur n’est pas titulaire d’un droit sur une marque. Des prétentions fondées sur le droit de la concurrence ne peuvent être prises en compte au motif que la défenderesse (2) n’exerce aucune activité à des fins de concurrence. Mise à part la violation du droit, le danger latent d’une réitération des faits , condition d’une demande en omission, fait également défaut. Celui-ci n’entre plus en considération dès lors que la requête en omission fondée sur l’enregistrement du nom de domaine pour le compte du défendeur (1) a été déclarée comme réglée et que le demandeur a de ce fait renoncé à la poursuite de sa demande. Pour une demande en omission préventive, c’est le danger latent de première commission qui fait défaut. En outre, les violations de droit invoquées ne pourraient conduire qu’à une prétention visant la cessation de l’acte concret violateur, et non pas à un blocage du nom de domaine sur internet.
II. Le pourvoi ne reçoit pas d’accueil favorable. Le demandeur n’est pas en droit de faire valoir contre la défenderesse (2) une demande en omission sur le fondement du § 12 Phrases 1 et 2 du BGB.
1. Par la première alternative de sa requête, le demandeur sollicite auprès de la défenderesse (2) que celle-ci omette elle-même d’utiliser le nom de domaine « kurt-biedenkopf.de » sur internet. Dès lors, le demandeur ne peut faire valoir aucune demande en omission d’après le § 12 BGB justifiée par le danger latent de réitération des faits ou de première commission, au motif que la défenderesse (2) n’a pas fait utilisation du nom du demandeur lui-même au sens du § 12 Phrase 1 BGB et qu’aucune utilisation ne doit en être faite par la défenderesse (2).
a) La défenderesse (2) avait seulement réservé le nom de domain « kurt-biedenkopf.de » pour le compte du défendeur (1). La juridiction d’appel a admis à bon droit que l’enregistrement et l’administration d’un nom de domaine n’étaient pas considérés comme une utilisation du nom dans le sens accordé par le § 12 phrase 1 BGB. Certes, on admet qu’une utilisation du nom est non autorisée si un non-titulaire du droit en question procède à l’enregistrement du nom de domaine dans le but de l’employer comme adresse e-mail, étant donné que l’effet exclusif à l’égard du titulaire du droit ne s’établit pas au moment seulement de l’utilisation sur internet mais déjà lors de l’enregistrement (voir BGHZ 149, 191, 199 – shell.de ; BGH, décision du 26/6/2003 – I ZR 296/00, GRUR 2003, 897, 898 = WRP 2003, 1215 – maxem.de [prévu pour la publication au BGHZ 155, 273]). Dans ce cas, l’usurpation d’état civil s’ensuit par le déclarant de l’adresse internet qui veut utiliser celle-ci comme nom, c’est-à-dire comme dénomination d’une personne ou d’une entreprise en tant qu’outil de différenciation vis-à-vis des autres. Par le simple fait d’enregistrer et d’administrer, la défenderesse (2) n’utilise pas l’adresse internet en sa qualité de nom. Contrairement à l’argumentation du pourvoi, la défenderesse (2) n’utilise pas non plus le nom de domaine enregistré comme dénomination d’un tiers (le déclarant) par un nom ne lui appartenant pas. Elle établit plutôt les conditions techniques seulement pour l’emploi (en conformité avec le nom) de l’adresse internet par le biais du déclarant (voir BGHZ 148, 13, 16 – ambiente.de).
b) La juridiction d’appel a contesté une participation intentionnelle de la défenderesse (2) au sens du § 830 Al. 1 et 2 BGB en qualité de coauteur ou de complice d’une violation du droit au nom commise par le défendeur (1). Ceci n’est pas attaqué par le pourvoi et ne laisse pas non plus reconnaître d’erreur dans l’interprétation du droit.
2. Il n’appartient pas non plus au demandeur de faire valoir une demande en omission de l’utilisation par autrui du nom de domaine « kurt-biedenkopf.de » sous la considération du danger latent de réitération des faits.
a) Comme la juridiction d’appel l’a admis à bon droit, la défenderesse (2) n’assume donc pas la responsabilité de fauteur de trouble au motif que, par la réservation du nom de domaine, elle se trouve en partie à l’origine de la violation du droit au nom du demandeur par le défendeur (1). La responsabilité de fauteur de trouble pose comme condition la violation d’une obligation de vérification. Il y fait défaut à l’égard de la réservation en tant que telle. Lors d’un premier enregistrement, aucune obligation de vérification ne pèse en principe sur la défenderesse (2) (BGHZ 148, 13, 18 – ambiente.de). La défenderesse (2) a pour mission d’utiliser et d’administrer le domaine de second niveau sous le domaine de haut niveau allemand « de » dans l’intérêt de tout internaute en même temps que dans l’intérêt public. Par là même, elle ne poursuit ni de propres desseins, ni n’agit à but lucratif. Avec peu de collaborateurs, elle garantit un enregistrement rapide et bon marché en ce qu’elle attribue, dans une procédure automatisée régie par le principe de priorité à lui seul, des noms de domaine déclarés. Par le biais de cette procédure automatisée qui a fait ses preuves, aucune obligation de vérification n’a lieu d’être. Dans cette phase de premier enregistrement, la défenderesse (2) n’a pas non plus besoin de surveiller les atteintes qui seraient totalement manifestes et perceptibles par quiconque (BGHZ 148, 13, 20 – ambiente.de ; approbation : Freytag, CR 2001, 853 ; Hoeren, Anm. zu BGH LM n°2 se référant au § 4 du MarkenG ; Meissner/Baars, JR 2002, 288, 289 ; Nägle, WRP 2002, 138, 144 ; Seifert, Das Recht der Domainnamen , 2003, page 139 ; critique : Bücking, Die wettbewerbs- und kartellrechtlichen Aspekte der Vergabe von Internetadressen in Deutschland, 2002, p. 79 et s. ; Schieferdecker, Die Haftung der Domainvergabestelle, 2003, p. 209 et s. ; Ubber, K & R 2001, 593, 594 et s. ; ders., Markenrecht im Internet, 2002, p. 255). Par conséquent, contrairement à l’argumentation du pourvoi, la violation d’une obligation de vérification de la défenderesse (2) ne peut trouver de justification en ce que la déclaration faite par le défendeur (1) aurait consisté en une violation de droit incontestable – également pour la défenderesse (2) –, au motif que celui-ci n’était pas identique en nom avec le domaine demandé, qui correspond au nom d’un personnage historique connu de tous.
b) La question de savoir s’il est possible qu’après l’enregistrement du nom de domaine (voir BGHZ 148, 13, 20 – ambiente.de), la défenderesse (2) ne se soit pas conformée en temps voulu à ses obligations fondées, sur indication du demandeur, sur une violation des droits de ce dernier, en ce que c’est seulement après l’introduction de l’instance qu’elle a reconnu par courrier du 20 Mars 2000 la prétention visant à supprimer le nom de domaine et procédé à sa suppression, n’a pas besoin d’être vérifiée. En effet, la requête du demandeur ne vise pas à ce qu’après l’enregistrement du nom de domaine, la défenderesse (2) ait également à remplir ses obligations de vérification dans un laps de temps donné. Le demandeur veut plutôt interdire à la défenderesse (2) de procéder dans l’absolu à l’inscription du nom de domaine « kurt-biedenkopf.de » pour d’autres persones et de laisser celles-ci en faire usage. Même s’il pourrait être reproché à la défenderesse (2) une violation des ses obligations de vérification d’un point de vue temporel, celle-ci ne justifierait pas pour autant la demande en omission invoquée.
3. Sous la considération du danger latent de première commission, il n’appartient pas non plus au demandeur sur le fondement du § 12 BGB de faire valoir la prétention selon laquelle la défenderesse (2) n’autorisera pas à l’avenir l’utilisation du nom de domaine « kurt-biedenkopf.de » par un autre que le défendeur (1), c’est-à-dire celle selon laquelle elle ne le réservera ni ne l’enregistrera pour autrui.
La juridiction d’appel a contesté la prétention du demandeur visant le « blocage » (intégral) du nom de domaine en argumentant qu’un tel blocage n’est justifié que si tout enregistrement d’un tiers représente une violation de droit manifestement perceptible par la défenderesse (2). Ce n’est pas parce que l’inscription est possible par un autre « Kurt Biedenkopf » et ne représenterait pas une violation de droit manifeste que cela est le cas. Si les attaques du pourvoi dirigées contre ces éléments ne remportent pas d’accueil favorable, c’est parce que, tout comme lors du premier enregistrement, la défenderesse (2) ne rencontre pas d’obligation de vérification lors d’une nouvelle inscription par un autre que le défendeur (1) après la suppression du nom de domaine.
a) Ainsi, lors de la phase de premier enregistrement, la défenderesse (2) se trouve libérée de toute vérification d’atteintes qui seraient incontestables et perceptibles par quiconque, au motif que c’est seulement de cette façon que l’on peut venir à bout de l’enregistrement d’un grand nombre de domaines de second niveau dans une procédure automatisée aussi rapide et rentable que possible (BGHZ 148, 13, 20 – ambiente.de). L’intérêt de la collectivité au maintien d’une telle procédure d’enregistrement fonctionnelle et efficace interdit à ce que la vérification de l’éventualité d’une atteinte de droit n’incombe à la défenderesse (2) dans le cas de figure à juger ici de ce qu’après la suppression d’un nom de domaine déclaré, le même nom de domaine soit plus tard demandé par un autre déclarant. En effet, pour pouvoir remplir d’éventuelles obligations de vérification, la défenderesse (2) devrait prendre des mesures techniques et organisationnelles qui se répercuteraient de façon préjudiciable sur la durée et les coûts de la procédure d’enregistrement. Par conséquent, le fait selon lequel infliger une obligation de vérification alourdirait de frais le travail de la défenderesse (2) est également valable pour le cas d’une réitération de l’enregistrement d’un nom de domaine auparavant supprimé pour le compte d’une personne autre que le premier déclarant. La question de savoir si la défenderesse (2) a l’obligation de veiller à ce que les droits du demandeur ne soient pas (de nouveau) violés par une réitération de l’enregistrement d’un nom de domaine identique ou semblable pour le défendeur (1), et le cas échéant dans quelle mesure, peut rester en suspens à cause de la restriction de la demande encore pendante visant l’omission de l’utilisation du nom de domaine par autrui.
b) Les intérêts du demandeur, aussi louables qu’ils soient, ne permettent pas une autre décision. Si un nom de domaine enregistré est supprimé parce que le pouvoir de déclarant du titulaire du nom est contesté comme dans le cas présent, celui-ci peut alors enregistrer le nom de domaine pour lui-même et protéger sa position avant l’enregistrement au moyen de ladite inscription de contestation auprès de la défenderesse (2) (voir BGHZ 149, 191, 206 – shell.de). S’il ne veut pas, tel le demandeur, revendiquer le nom de domaine comme adresse internet pour lui-même, il peut, dans la mesure où le futur enregistrement du nom de domaine pour un autre viole ses droits, en réclamer la suppression auprès de la défenderesse (2) si la violation concrète de droit est manifeste et peut être constatée sans aucune difficulté par la défenderesse (2) (voir BGHZ 148, 13, 20 – ambiente.de). Etant donné que le demandeur peut dès lors protéger de manière satisfaisante ses intérêts même dans le cas d’une violation de droit incontestable et manifeste aux yeux de la défenderesse (2), il ne lui est pas offert d’infliger à celle-ci une obligation de vérification après la suppression du nom de domaine et au moment de la réitération de l’enregistrement pour un nouveau déclarant.
c) En outre, contrairement à l’argumentation du pourvoi, on ne peut pas partir du principe selon lequel tout enregistrement concevable d’un tiers sous le domaine représente une violation de droit incontestable et manifeste aux yeux de la défenderesse (2).
aa) Un tiers au nom identique pourrait se prévaloir du principe de priorité au motif que le demandeur n’a jusqu’à présent ni fait enregistrer son nom ni fait protéger sa position au moyen de ladite inscription de contestation. La règle de priorité ne peut pas trouver application dans le seul cas où l’intérêt du titulaire d’un nom à l’utilisation absolue de son nom recule aussi clairement devant l’intérêt d’un autre titulaire de nom que les égards dont sont tenues les personnes de même nom l’une envers l’autre disposent que celui-ci utilise un complément pour son nom de domaine (voir BGHZ 149, 191, 200 et s. – shell.de). En l’espèce, on ne peut pas partir du principe, clairement manifeste pour la défenderesse (2), selon lequel la priorité serait octroyée à l’intérêt du demandeur dans toute circonstance face à un titulaire de nom identique malgré sa priorité. Le demandeur ne veut pas revendiquer le nom de domaine pour lui même en tant qu’adresse internet. Par conséquent, faute d’une propre intention d’utilisation, il n’est pas lésé dans son intérêt digne de protection en ce que l’adresse internet formée à partir du nom « kurt-biedenkopf » ne peut être attribuée comme toute autre qu’une seule fois et qu’il est dès lors exclu de l’utilisation correspondante de son nom aussitôt que la défenderesse (2) procède (une nouvelle fois) à l’enregistrement du nom de domaine pour le compte d’un tiers (voir BGHZ 149, 191, 198 – shell.de ; Jacobs, Gesetzliche Teilhabe an Domain-Names, 2003, page 110). La question de savoir si d’autres intérêts prépondérants et dignes de protection du demandeur sont lésés par l’utilisation du nom de domaine par un titulaire de nom identique, par exemple à cause d’un risque de confusion possible, dépend des circonstances du cas d’espèce, en particulier du degré de connaissance du nom du demandeur au moment du conflit, des perspectives de circulation lors de l’entrée sur internet de ce nom et de l’intérêt du déclarant au nom identique justement pour cette adresse internet. On ne peut pas accepter le fait que la prise en compte des intérêts respectifs offerte plus tard dans un cas d’espèce doive obligatoirement conduire, dans toutes les circonstances imaginables, à un résultat clairement apparent et indéniable également pour la défenderesse (2) au profit du demandeur (en ce sens voir aussi Schiefedecker aaO page 265).
bb) Dans la mesure où un déclarant dont le nom diffère fait une demande d’enregsitrement du nom de domaine, il n’est pas non plus prouvé qu’une atteinte (pas seulement ??) préjudiciable des intérêts dignes de protection du demandeur apparaisse obligatoirement clairement pour la défenderesse (2) dans toutes les circonstances. Certes, chaque intérêt du titulaire du nom est protégé, qu’il soit simplement personnel ou bien conceptuel ; cela suffit que le titulaire du nom soit mis en quelconque liaison avec un tiers par le biais de l’utilisation non autorisée du nom par ce tiers (voir BGHZ 124, 173, 181 m.w.N.).
Lors de l’examen de savoir si, dans chaque cas d’utilisation du nom de domaine par un tiers de nom différent, le danger d’un trouble de connexion irrecevable est clairement apparent, trouble contre lequel le demandeur peut entrer en action, il est de première importance, tout comme lors de l’utilisation faite par une personne au nom identique, que le demandeur ne veuille pas employer lui-même son nom comme adresse internet. Les intérêts dignes de protection du demandeur ne sont pas (encore) touchés par le simple enregistrement, étant donné que l’exclusion du propre emploi, faute d’une volonté d’utilisation correspondante, qui est liée avec l’enregistrement pour un tiers, ne porte pas préjudice au demandeur. Les intérêts dignes de protection du demandeur ne peuvent par conséquent être violés que si le tiers utilise le nom enregistré pour son compte réellement comme adresse internet. La question de savoir si, d’après l’utilisation concrète, le risque d’un trouble de connexion existe justement pour le demandeur ou si un tel risque est exclu à cause de l’établissement de la page internet appelée sous l’adresse internet, dépend une nouvelle fois des circonstances du cas d’espèce. Ensuite, on ne peut pas partir du principe selon lequel dans chaque cas, le risque d’un trouble de connexion est donné et que la connexion s’ensuit du reste pour le demandeur et pas pour un autre titulaire de nom. A bon droit, on ne peut pas constater l’évidence et la claire reconnaissance par la défenderesse (2) de troubles de connexion.
4. La juridiction d’appel a contesté à bon droit les prétentions fondées sur le droit des marques ou de la concurrence. Le pourvoi ne formule quant à celles-ci aucun grief.
III. La décision de condamnation aux dépens résulte des § 97 Al. 1 ZPO, §§ 566, 515 Al. 3 Phrase 1 ZPO ancienne version.
Dispositif officiel
ambiente.de
MarkenG § 4 Nr. 2, § 14 Al. 2 Nr. 3 ; GWB § 20 Al. 1
a) La société DENIC, compétente pour l’enregistrement des noms de domaine sous le domaine de haut niveau « de », n’est en principe soumise à aucune vérification, avant l’enregistrement, visant à savoir si le nom de domaine inscrit viole les droits de tiers et ce aussi bien sous la considération de la responsabilité de fauteur de trouble qu’en qualité de destinataire de normes sur l’interdiction de l‘empêchement sur le plan de la législation sur les cartels.
b) Si un tiers indique à la société DENIC que selon lui, un nom de domaine enregistré viole le droit à la caractérisation lui appartenant, c’est sa responsabilité en tant que fauteur de trouble ou bien sur le plan de la législation des cartels qui est prise en compte pour l’avenir, seulement si la violation de droit est manifeste et constatable sans difficulté par DENIC. En règle générale, DENIC peut renvoyer le tiers à l’élaboration d’une mise au point par rapport au détenteur du nom de domaine controversé.
Nils H. Bayer
Rechtsanwalt (Berlin)
Avocat à la Cour (Paris)
(vom 25 mars 2007)